Le terme de « draille de Margeride » a une force d’évocation poétique qui donne envie de l’utiliser, ce dont je ne me prive pas. Mais il manque de précision pour décrire le réseau de chemins dont il est question ici, car plusieurs autres itinéraires de transhumance permettent de conduire les troupeaux du Languedoc en Margeride, et inversement certains tronçons de cet ensemble divergent et mènent à d’autres massifs. Il est plus exact de parler de la collectrice de l’Asclié (voir « Histoire générale des drailles« ), et de réserver le terme de draille pour les petits tronçons qui convergent vers la collectrice elle-même.
La collectrice de l’Asclié, donc, est un ensemble d’itinéraires de transhumance qui rassemble au col de l’Asclié diverses drailles en provenance des plaines du Bas-Languedoc, mène près de Florac ou elle se divise à nouveau en drailles à destination de plusieurs massifs. Etudions la chose d’un peu plus près.
Pour permettre aux troupeaux des Cévennes orientales et de la Crau de faire route vers le nord du Gévaudan, trois drailles montent de la plaine à partir Ganges, Saint Bauzille de Putois et Tornac (une autre collectrice part d’ailleurs de Tornac pour monter directement au nord vers le Mont Lozère et le Tanargue). Ces trois branches convergent vers le col de l’Asclié, ou elles se réunissent pour former la collectrice proprement dite.
La collectrice suit alors la crête pour monter en direction du massif de l’Aigoual. A Aire de côte, au lieu de continuer vers le sommet, elle prend plein nord. Une longue crête horizontale bien pratique la fait passer au col de salidès et lui permet de prendre pied sur la can de l’Hospitalet, le territoire qui nous intéresse tout particulièrement, au pied d’une petite excroissance calcaire appelée Peyre-Agude. A noter que depuis les environs du col du Marquaïrès, il était possible de descendre vers Vébron et de remonter vers Cabrillac, ce qui constituait une jonction entre les drailles de Margeride et d’Aubrac.
Elle traverse la can dans presque toute sa hauteur, passant par l’Hospitalet (où elle fusionne avec une seconde branche qui arrive de Saint Jean du Gard par l’arête de l’actuelle Corniche des Cévennes, voir ci-dessous), le col de Solpérière, le col des Faïsses et Terre-Rouge, pour atteindre le Col du Rey, site de péage pour les troupeaux. Là elle se divise en deux branches :
- Une branche part vers Barre, la can de Barre et rejoint le Mont Bougès et le Mont Lozère par Saint Julien d’Arpaon.
- Une autre branche part vers le nord. Au niveau du col de Vache, la collectrice quitte le plateau et descend vers Tardonnenche puis Florac. A partir de là, elle se divise en en deux drailles, l’une part vers l’Aubrac par Ispagnac et le causse de Sauveterre, l’autre vers la Margeride par l’eschino d’Aze, l’extrémité ouest du Mont Lozère, le col de la Loubière…
La branche de la corniche des Cévennes
Les troupeaux montant de la région Nîmoise rejoignaient la draille de Margeride par un autre itinéraire, qui suivait approximativement l’actuelle Corniche des Cévennes : de Pied de côte près de Saint Jean du Gard, la draille montait au col Saint Pierre, se maintenait approximativement à l’horizontale sur le sommet de crête jusqu’au Pompidou, puis montait tout droit à l’assaut de la can en coupant les virages de l’actuelle route vers l’Abeuradou (l’abreuvoir), les pésières, la borie. De là, elle partait plein est vers la côte 1035, près de la ferme des Crottes, regagnait l’emplacement de la D9 au point 1028, passait près de l’aven de Montgros, puis rejoignait l’Hospitalet par la D9.