J’habite au pied de la « Can », ce petit plateau calcaire autrefois rattaché au Causse Méjean, dont la partie la plus connue est la « Can de l’Hospitalet ». Au titre de voisin, cet endroit m’intéresse tout particulièrement, encore plus si c’est possible que les milliers d’autres coins fabuleux des Cévennes. J’y passe beaucoup de temps, en balade de famille, pour des cueillettes, ou tout seul à errer là où mes pas me mènent… Pendant longtemps, par simple intérêt personnel et sans y faire vraiment attention, j’ai amassé plein d’infos sur l’histoire, la préhistoire, les lieux-dits…
Un jour, il y a longtemps déjà, un vieil érudit local m’a soufflé l’idée de formaliser un peu cette démarche. Il s’agissait de Roger Lagrave, personnage singulier de la région floracoise, au parcours personnel riche et atypique. Depuis 40 ans il farfouillait les archives départementales, sillonnait les massifs, faisait parler les gens, et au rythme régulier d’un par an, il produisait sur cette base un fascicule mi romancé mi documentaire, qui venait compléter le catalogue de la localement célèbre maison d’édition « Gévaudan Cévennes », créée par et pour Roger et ses œuvres.
Dans un lointain passé donc, Roger avait un temps porté son dévolu sur la can. Après quelques recherches il avait produit un petit document ronéotypé intitulé « Notes d’histoire sur la Can de l’Hospitalet ». Ces quelques pages jaunies par le temps, dont toutes les lettres « o » sont évidées à l’emporte-pièce par la frappe de la machine sur laquelle Roger a sans doute tapé ce texte de ses seuls index sont maintenant soigneusement classée dans mon étagère et ne la quitteront pas de mon vivant. Non pas pour la valeur de leur contenu – qui est modeste – mais parce qu’elles représentent pour moi le début d’une belle aventure, qui a pourtant commencé longtemps avant ma naissance, en une région avec laquelle je ne ferai connaissance que de très nombreuses années plus tard.
Un jour Roger m’apporte ce document. Il me le met dans les mains en me racontant le projet qu’il a eu un jour, mais que de projets, dame, il n’en manque pas, et que son âge ne lui permettra pas de les mener tous à bien. Il me demande si je ne connaîtrai pas « quelqu’un » qui serait intéressé pour reprendre ces notes et continuer le travail sur la Can. Roger est un malin. Malgré son ton détaché et innocent, il sait que j’aime beaucoup ce lieu, que j’y passe beaucoup de temps, et que ma manière de m’y intéresser ressemble beaucoup à la sienne, très éclectique, disparate et vaguement foutraque à vrai dire…
Roger est une sorte de personnalité locale, son appel du pieds et sa confiance me touchent, entrent en résonance avec une sorte d’envie personnelle jusque là obscure pour moi même. Cet appel suffit à réveiller tout ça, et à me faire comprendre qu’un tel travail me passionnerait. Alors je me suis mis au travail.
Me voici donc arpentant plus méthodiquement le territoire, lisant tout ce qui a été écrit sur le sujet par des historiens amateurs ou professionnels, fouillant aux archives départementales, interviewant des anciens qui connaissent encore des tas de choses… C’est une démarche probablement sans fonds mais passionnante.
Pour l’instant je ne privilégie aucun site particulier, aucune époque particulière : tout ce que je trouve atterrit quelque part dans le site, classé du mieux que je peux dans une sorte de bric-à-brac un peu fourre-tout. Et puis, parfois, des lignes directrices apparaissent qui me permettent de regrouper des informations, de leur donner un sens plus global… ça avance tout doucement…
Merci à Roger du coup de pouce qu’il m’a donné, et pour la partie d’infos livrées ici issues de son travail.