Les critiques proposées ci-dessous ont été compilées par la bibliothèque de la cinémathèque française à partir de revues nationales. Elles sont également disponibles à l’adresse suivante : http://www.cinematheque.fr/fr/dans-salles/hommages-retrospectives/revues-presse/rene_allio/camisards.html
Combat
« On ne peut à la fois plonger dans le passé en restituant le véritable climat de l’époque, et avoir en tête le schéma un peu simpliste de la contestation actuelle. Ce qui était complexe, subtil, et un peu mystérieux devient – du coup – caricatural (…). De belles intentions, une sincérité évidente, mais un étonnant manque de fermeté dans le propos et l’écriture. Pour une fresque, il aurait fallu une palette moins délavée, et un ton peut-être plus viril. Quand pourra-t-on – dans le cinéma français – faire un film intelligent sans montrer qu’on reste un intellectuel ? »
Henry Chapier, 19.02.1972
Carrefour
« On peut dire que toutes les scènes qui se passent dans le camp du roi sont ridicules (…). En face de ces piteuses troupes, les religionnaires sont admirables de dignité, d’efficacité, de noblesse, de courage. René Allio a eu l’idée excellente de faire commenter leurs exploits, leurs marches et leurs combats par le récit de l’un d’entre eux (Rufus), récit authentique tiré d’un journal de marche qui a été retrouvé, plus éloquent dans sa simplicité, sa droiture, que n’importe quel dialogue édifiant. Là est la réussite du film. Quel dommage, je le répète, que ces scènes excellentes qui se déroulent dans l’admirable paysage des Cévennes, soient coupées par ce vaudeville militaire et mondain dont je parle plus haut ! »
Michel Mohrt, 23.02.1972
La Croix
« Dans son genre, au regard de la probité historique, Les Camisards est une œuvre aussi importante que, de Rossellini, La Prise du pouvoir par Louis XIV. Car s’y manifeste un identique souci de l’exactitude de l’environnement (…), de la vérité des détails comme les virent Callot, Le Nain (…) et, conséquemment, de l’insertion dans la véritable Histoire – celle des civilisations (…). On pouvait imaginer dix autres styles pour cette évocation des Camisards. Celui de René Allio – compte tenu de mes bémols d’historien – manifeste une prise de conscience qui rejoint, tout brechtisme à part, la modernité des maîtres actuels de la science historique. »
Jean Rochereau, 27.02.1972
Les Echos
« Grave (…) et sans complaisance, le film de René Allio est beau (…). C’est le début de cette révolte que René Allio a reconstitué. Son film est le contraire d’une fresque historique. Tourné avec de petits moyens, il raconte moins les batailles cévenoles que la prise de conscience, chez les paysans, de la nécessité de résister, de se battre, de se venger. Peu de comédiens connus (hors Rufus), mais une distribution homogène. Peu de morceaux de bravoure, mais un tableau fidèle, réaliste et vigoureux d’une résistance qui peut pour le spectateur d’aujourd’hui évoquer des exemples contemporains. »
Annie Coppermann, 25.02.1972
L’Express
« Des premiers sursauts de ce qui allait devenir la guerre des camisards, René Allio (…) a fait un beau film un peu froid, peut-être distancé à l’excès. Bien que le cœur et la raison penchent en faveur des révoltés, Allio essaie de ne pas trop solliciter notre indignation. Il montre des royaux presque sympathiques : il ne cache pas les crises de frénésie mystique des Enfants de l’Eternel, les illuminations douteuses des prophètes, leurs querelles, ni certaines de leurs défaillances (…). Peu expert aux vastes mouvements de figurants, Allio a bien fait de ne mettre en scène, dans le paysage intact et grandiose des hautes Cévennes, que les premiers feux de la rébellion. Son film y gagne une belle qualité de réalisme, de proximité. Les lieux où il a été tourné sont encore tout imprégnés de la légende sanglante des attroupés du désert. »
François Nourissier, 14.02.1972
Le Figaro
« On attendait mieux et plus de (…) René Allio. Mais peut-être l’intimisme lui convient-il mieux que l’épopée (…) ? Je regrette que l’œuvre n’aboutisse pas à la réussite que le thème exigeait. J’ai ressenti surtout un faux lyrisme, une absence d’âme. »
Louis Chauvet, 18.02.1972
France-Soir
« Les Camisards est (…) autant la reconstitution fidèle d’un moment de la révolte des protestants opprimés après la révocation de l’Edit de Nantes que l’explication d’une prise de conscience. Ce film donne à réfléchir autant qu’à voir. C’est (…) pourquoi ceux qui demandent au cinéma d’être autre chose qu’une simple distraction ne voudront pas manquer. »
Robert Chazal, 17.02.1972
L’Humanité Dimanche
« Un film d’une prodigieuse rigueur – quasiment janséniste – et d’une beauté incomparable. [René Allio] s’est contenté de la vérité reconstituée, plus convaincante et plus violente, plus prenante aussi. »
Samuel Lachize, 21.02.1972
Le Journal du Dimanche
« René Allio ne s’intéresse guère au pittoresque des reconstitutions historiques, ni aux kermesses historiques des combats de cinéma. Il se contente au passage de réussir les unes et les autres sans insister (…). Jamais un tel vent d’intelligence n’avait soufflé sur le mont Aigoual. »
[S.N.], 20.02.1972
Les Lettres françaises
« La réussite remarquable du film d’Allio tient (…) à l’extrême cohérence de tous ces éléments, à leur articulation dans un récit sans bavures et sans abus d’effets faciles. Si la lutte farouche des Camisards prend aujourd’hui, par le truchement de ces images, une nouvelle dimension et fait écho à d’autres combats de libération (…), Allio montre les limites historiques et idéologiques (…). C’est d’abord un hommage aux combats des opprimés, ceux de 1702 et ceux de tous les temps ; et une leçon qui vaut toujours d’être méditée. René Allio est fidèle en cela à sa vision personnelle où la recherche des chemins de la prise de conscience tient une place décisive de La Vieille dame indigne à Pierre et Paul. Mais par des moyens renouvelés, une lucidité plus aigüe encore, une constante qualité d’exécution. Les Camisards portent cette réflexion depuis longtemps entreprise à un degré exceptionnel d’accomplissement. »
Michel Capdenac, 23.02.1972
Le Monde
« Il serait vain de chercher dans ce film ce qui ne s’y trouve pas : les fariboles ordinaires du divertissement historique. Les personnages d’Allio appartiennent à un monde dur et grave, celui qu’illustrèrent Callot et Le Nain. Il arrive également que le regard brechtien du réalisateur et son intransigeance imposent au récit une froideur apparente, voire même une grisaille, qui risquent de déconcentrer des spectateurs plus épris d’aventures que de réflexion morale et politique. Mais l’œuvre est pure et noble, et, après le stupide bannissement dont elle fut victime, elle devrait trouver son public. »
Jean de Baroncelli, 19.02.1972
La Nation
« René Allio, spécialiste du film intimiste (…) se risque ici dans le genre historique. Il y transpose ses points de force, et aussi ses faiblesses et ses limites (…). René Allio a, comme on dit, fait avec ce qu’il avait. Et c’est très beau. »
Jean-Michel Bernard, 13.03.1972
Le Nouvel Observateur
« René Allio aime à dire que nous n’avons pas, en histoire comme ailleurs, de films français qui nous parlent de la masse nationale, c’est-à-dire des provinces. Nous avons seulement, dit-il, des films parisiens. Allio, lui, a su porter son regard très au-delà des rideaux de béton du boulevard périphérique ; il a planté sa caméra dans le granit bleu des Cévennes. Il a inscrit sur sa bande sonore les psaumes de Clément Marot. Est-ce à dire qu’il a réalisé sur un sujet français un véritable film français ? Sûrement pas, et Dieu merci (…). Pour le bénéfice de tous, Occitans et hommes du Nord, et dans le plus stricte respect des textes, sans cet expressionnisme gratuit qu’on trouve dans Les Diables de Ken Russell, Allio a réalisé en fait le meilleur, le plus tragique de nos films languedociens en langue d’oïl. Un film qui, pour le Cévenol que chacun d’entre nous porte en son cœur, donne envie tour à tour de pleurer, d’aimer, de tuer, ou tout simplement de marcher dans la montagne et de se baigner dans les torrents. L’exploit d’Allio n’est pas mince, et je souhaite à ces Camisards des spectateurs et des fans plus nombreux encore et plus hystériquement admiratifs que ceux qui, jadis, acclamaient les Cévenols, en 1703, dans leurs assemblées ou traversées du Désert. »
Emmanuel Le Roy Ladurie, 14.02.1972
Les Nouvelles littéraires
« Tout le début du film est remarquable et, dans un registre tout différent, nous avons plaisir à retrouver le René Allio de La Vieille dame indigne (…). Travaillant dans un genre nouveau pour lui, la reconstitution historique, il manifeste une incontestable maîtrise, encore qu’il soit moins habile à faire agir les nobles que les paysans. Quelques allégements dans la partie centrale, confuse, et qui sacrifie parfois au spectaculaire, auraient permis aux Camisards d’être une des meilleures productions du jeune cinéma français. »
Georges Charensol, 27.02.1972
Télérama
« Ce qui frappe dans ce film, dès les premières images, c’est son extrême sobriété. Nous sommes loin du film dit historique à grand spectacle. René Allio traite l’Histoire avec d’autant plus de respect qu’il en refuse l’habituelle convention théâtrale. On croit à ses paysans misérables, qui portent des habits dépareillés, ramassés ici ou là, souvent sur leurs ennemis défaits, les soldats du roi (…). Cette insurrection, René Allio nous en montre la montée et l’organisation progressive, à coups de petits détails pris sur le vif. Nous sommes étonnamment proches de cette poignée d’hommes qui arpentent la montagne cévenole, revenant à une vie libre pour défendre leur liberté. On croit à ces paysans, à chacun de leurs gestes, comme on croit aux pierres, aux torrents, à cette nature sauvage et belle avec laquelle font corps les insurgés (…). Les Camisards est peut-être le premier film historique français qui ne ressemble pas à un album d’images d’Epinal. »
Claude-Marie Trémois, 19.2.1972
Témoignage chrétien
« Le film de René Allio, nous restitue une tranche de cette histoire protestante trop oubliée avec un souci constant de fidélité historique qui ne ménage ni les uns ni les autres (…). Dans son film, malgré des images un peu trop léchées, l’auteur nous présente ces fous de Dieu tels qu’ils furent (…). Le film m’a plu (…). Certainement parce qu’il est actuel. »
Marcel Henriet, 17.02.1972
« Des antécédents heureux (…) nous disposaient volontiers en sa faveur. Mais sur le plan du style Les Camisards serait plutôt en régression. Il est difficile de nier la qualité de l’interprétation (…). La qualité de la photo contribue aussi à ce que le film se laisse voir avec plaisir. On sera sensible au souci documentaire (mœurs, costumes) qui aboutit parfois à son humour plus ou moins volontaire. Mais cette addition de qualités certaines ne fait curieusement pas un grand film, s’il en résulte une œuvre toutefois respectable. L’intelligence et la sensibilité d’Allio ne font aucun doute. Les promesses d’auteurs contenues dans ses premiers films, par contre, ne s’épanouissent pas totalement ici. »
Gaston Haustrate, 17.02.1972