Mitterrand et les Cévennes

« La chute lente du Ventoux sur la plaine de Carpentras,
la tête ronde du Beuvray, la Loire laquée de Saint Benoît, la roche de Solutré,
la solitude de l’Aigoual
sont pour moi des points de repère plus importants que la date des élections législatives »

« Ma part de vérité », François Mitterrand, 1969

En 2002, je découvrais, suspendue sans façon au mur d’une cuisine cévenole, une étonnante photo. On y voyait le propriétaire des lieux serrant la main à François Mitterrand. La scène, qui n’avait pour témoins que deux gendarmes et quelques amis, se déroulait au beau milieu d’un pré de la can de l’Hospitalet, ce petit plateau calcaire situé au sud de la Lozère, entre le Mont Aigoual, le Mont Lozère et le causse Méjean. Intrigué, j’interrogeai mon hôte qui me raconta l’histoire du cliché. Dans les années 70 et 80 Mitterrand séjournait régulièrement dans le massif de l’Aigoual, ou l’accueillait un ami. Il repartait généralement vers Paris en hélicoptère, et cette fois là son équipe de sécurité avait choisi ce pré pour faire atterrir l’engin, sans prévenir ni le propriétaire ni les gendarmes, qui avaient tous accouru pour en savoir plus et avaient eu la stupéfaction de se trouver face au Président de la République.

L’histoire, amusante, m’inspira l’écriture d’une nouvelle de fiction. Puis j’oubliai cette aventure.

Dix ans plus tard, j’eus l’occasion de passer un peu de temps dans le village de Rousses, situé au pied du Mont Aigoual, tout près de l’ancien lieu de villégiature du Président. J’eus la surprise de constater que de nombreuses personnes avaient croisé Mitterrand, de manière rapide et anecdotique, certes, mais que ces rencontres avaient laissé un souvenir fort dans le pays. Me revint en mémoire la petite phrase que le Président avait adressée à son interlocuteur en lui serrant la main dans le pré de la can de l’Hospitalet avant de monter dans son hélicoptère :

« Vous habitez un beau pays, Monsieur. Rude, mais beau ! »

J’eus alors envie de comprendre ce qui avait bien pu attirer Mitterrand dans notre petit pays, et ce qui s’était noué entre l’homme, le territoire et ses habitants. En écoutant les souvenirs des cévenols, et en les croisant avec des éléments de la petite et parfois de la grande Histoire, je parvins à me faire une idée sur cette question. Je vous la livre ici.

Rencontres

5 décembre 1965 : premier tour des élections présidentielles. Charles de Gaulle, Président sortant, héros de 1940, pense l’emporter en un seul tour. A 20h30, bien avant les résultats officiels, une estimation diffusée sur les médias annonce qu’il serait en ballotage avec 45% des voix, suivi par Mitterrand à 35% des suffrages. Le soir même, les résultats officiels confirment ce classement. Quelques jours plus tard, le second tour place le Général en tête.

Dans les semaines qui suivent, François Mitterrand s’interroge sur l’estimation diffusée sur les médias le soir du premier tour. Les résultats d’un vote n’avaient encore jamais été donnés à l’avance. La technique du « sondage de sortie d’urne », aujourd’hui classique, n’était pas encore pratiquée en France. Son efficacité éveille l’intérêt du candidat déçu, en vue de futures campagnes électorales. Il aimerait en savoir plus. L’un des proches de Mitterrand, Robert Badinter, va le renseigner : la prévision a été réalisée par un certain Charles Salzmann, un de ses amis2. Mitterrand demande à Badinter d’organiser une rencontre avec lui. Celle-ci a lieu au début de l’année 1967.

Durant cette entrevue, Charles Salzmann explique à Mitterrand comment il a mis au point ce premier sondage électoral grâce à de nouvelles méthodes statistiques importées des Etats-Unis. Mais ce n’est là qu’un des nombreux sujets qu’ils abordent. A la vérité, le courant passe immédiatement entre les deux hommes et durant 3 heures ils parlent de tout : politique, bien sûr, mais aussi philosophie, et surtout littérature, un sujet qui les rapprochera toute leur vie. Au détour de la conversation, Charles Salzmann raconte au Président qu’il passe ses vacances à Massevaques, un petit hameau perché sur le flanc nord de l’Aigoual, où il a quelques années auparavant acheté une maison3. Voilà comment il raconte la suite de l’histoire :

« Un soir de ce même été, vers 19 heures, on sonne à la porte de la cuisine de ma maison cévenole, où nous nous apprêtions à dîner. C’était François Mitterrand. « Je passais par là avec quelques amis. Je me suis souvenu que vous y aviez votre maison. J’ai souhaité vous dire bonjour… j’espère que je ne vous dérange pas ». En fait, il avait voulu voir comment je vivais et ainsi mieux apprécier qui j’étais. Ce qu’il vit de ma vie simple, élémentaire, dans ces merveilleuses Cévennes, un des endroits les plus beaux du monde, dut lui plaire; Toujours est-il qu’il prit ensuite l’habitude d’y venir passer quelques jours, presque chaque année, et même bien après être devenu président de la République.»4

Rapidement, Massevaques devient un lieu important et un rendez-vous régulier pour Mitterrand. Il y vient au moins une fois par an, plus lorsqu’il le peut. Il profite parfois d’un des week-ends prolongés de mai, accourant après avoir assisté aux cérémonies commémoratives. Le plus souvent il vient à l’automne, l’une des plus belles saisons qui soit sur les flancs de l’Aigoual. Beaucoup d’aspects de ce petit pays lui plaisent profondément. Avant tout, la nature.

Au détour de la piste apparaît Massevaques

« Au spectacle de la nature il m’arrive souvent de vivre ces moments de bonheur où l’on s’arrête et dit : c’est le plus bel endroit du monde. La terre, notre amie, prodigue ses merveilles. Je la contemple depuis l’enfance sans épuiser jamais cette faculté d’étonnement qui naît de la beauté et qui donne l’obscure envie de remercier quelqu’un. »5.

Voilà sans doute la première chose que Mitterrand vient chercher sur les flancs de l’Aigoual : la nature sauvage. Massevaques est entouré d’immensités désertiques où ne résonnent que le brame du cerf à l’automne, et parfois le grondement lointain du Tapoul en crue. Un peu plus loin, le Causse Méjean et les crêtes schisteuses des Cévennes offrent une fabuleuse diversité de territoires sauvages.

Mitterrand aime particulièrement les forêts.

« Mon itinéraire de vie me conduit, me ramène de la forêt des Landes à celle du Morvan. Quand un voyage me le permet, je n’oublie jamais le détour par Tronçais, par Bellème ou par la Margeride. Selon l’humeur, c’est Rambouillet que je préfère, quand ce n’est pas une autre, toutes les autres, Chantilly ou Fontainebleau, la Sologne de mes ancètres ou la Double de mon enfance. On composerait un poème à tracer sur le papier le nom, simplement le nom, des forêts de Chaource et de la Dombe, de Brocéliande et de la Chaise-Dieu. Ce que j’y trouve, il me faudrait de longues heures pour l’exprimer en quinze lignes. »6

Il est étonnant de constater que dans ce texte Mitterrand n’évoque pas les forêts de l’Aigoual, profondes et magnifiques, au cœur desquelles il passera beaucoup de temps, à marcher mais aussi à chercher des champignons, dont il est particulièrement friand. Il est d’ailleurs amateur de tous les produits de la nature (« Papa avait rencontré Mitterrand qui cueillait des fraises vers Cabrillac »), dont la récolte silencieuse et contemplative est en elle-même ressourçante.

C’est souvent au cœur de la nature, en Cévennes et ailleurs, que Mitterrand viendra chercher le calme et l’inspiration avant les nombreux moments difficiles de sa carrière politique7. De ces immersions il sortira souvent conforté, renforcé, prêt à affronter les épreuves.

***

Mitterrand monte d’un pas tranquille mais assuré vers le sommet d’une colline. Derrière lui, des personnalités politiques et des journalistes le suivent avec peine, crachant leurs poumons. Au loin, des paysages somptueux de vignobles et de crêtes calcaires.

La télévision nous a souvent montré ces images. L’ascension rituelle de la roche de Solutré8 fût parfois présentée comme une tradition folklorique ou une stratégie de communication. Ce rituel avait pourtant un sens réel pour Mitterrand car depuis toujours il aime profondément la marche. Elle lui fait un bien physique tant qu’intellectuel.

« Une bonne partie de l’après-midi j’ai marché droit devant moi à perte de ciel et de terre. Je respirais un air léger, brûlé, qu’embaumaient les herbes balsamiques (on retrouve leur odeur dans le lait des brebis). Au dessus du Rajal del Gorps un épervier planait. J’ai suivi la trace de la transhumance le long de pistes rectilignes qui, soudain, bifurquaient parmi les archipels de roches sculptées par l’érosion. Je m’émerveillais de fouler ce fonds des mers qu’un lent mouvement du feu central a soulevé jusqu’à mi-chemin de l’espace et je l’apostrophais. O ! terre, si précieuse, si précaire. Si nous n’y prenons pas garde elle va nous manquer sous les pieds. »9

Les flancs de l’Aigoual, et au delà les Cévennes et les Causses environnants, offrent à Mitterrand un inépuisable terrain pour assouvir son besoin de marche. Il parcourt les alentours en tous sens, parfois seul, souvent accompagné de Salzmann ou de quelques amis. L’une de ses promenades favorites consiste à descendre déjeuner à l’auberge de madame Ponge, aux Vanels. Le chemin, grandiose, monte au Prat du Terron (le col qui domine Massevaques), puis redescend vers le serre de Combe-calde et le col de Peyrerol, traverse le hameau de Montcamp et rejoint les Vanels par le ravin de canto-loubo. Deux heures de marche pour se mettre en appétit. Cet itinéraire, Mitterrand l’a si souvent emprunté qu’il reste dans les mémoires des cévenols comme « Le chemin de Mitterrand ».

***

Et puis il y a les paysans cévenols. Mitterrand est d’origine rurale, il en est fier et l’évoque régulièrement dans ses livres : « Il faut naître en Province et toucher aux racines pour comprendre d’instinct les relations des sociétés humaines et du sol où elles vivent »10. Quand il parle de la campagne française, son ton est toujours lyrique : « Les champs s’étalaient, gras et vides, mûrissant, sous les haleines de l’hiver, des naissances secrètes. Des villages blanc et gris séparaient les chemins et les hommes, nonchalamment, sciaient leur bois devant les portes, s’interpellaient en quête des nouvelles de la nuit, poussaient en douceur sur les pédales des bicyclettes ».11

Dans les années 60 en Lozère, l’un des départements les plus ruraux de France, et particulièrement sur les flancs de l’Aigoual, la société moderne ne s’est pas encore installée. La vie ressemble encore à celle du XIXème siècle. Le rapport à la terre n’a pas été modifié par les nouvelles formes d’agriculture qui valorisent les meilleures terres en abandonnant les autres. Ici le paysan travaille à son rythme, entretenant la moindre parcelle, montant des murettes et amenant l’eau sur de lointains versants. Mitterrand aime prendre du temps avec ces gens ancrés dans le concret, enracinés à leur terre. Leur bon sens, leur simplicité font du bien à l’homme politique, souvent empêtré dans des situations complexes, des rapports de force et des manigances. On peut réellement penser que cette affection que porte Mitterrand au monde agricole a, des années plus tard, joué un rôle dans l’engagement qu’il prit – et tint – d’annuler le projet d’extension du camp militaire du Larzac.

A chacun de ses passages sur le contrefort du Mont Aigoual, Mitterrand coule des jours tranquilles.

La maison de Charles Salzmann est une bâtisse cévenole traditionnelle, dont il a conservé le cachet d’origine, avec ses vieilles poutres en bois taillées à la hache, les vieilles portes, les contrevents… Il y règne une atmosphère d’autrefois, rustique et ancrée. On s’y chauffe au bois. Il n’y a pas le téléphone. Pour entrer en contact avec le monde, l’illustre hôte doit faire comme tout le monde : se rendre chez une voisine, Mme martin, qui possède la seule ligne du village.

La tranquillité du lieu est propice à la réflexion et à l’écriture. Mitterrand rédigera plusieurs chroniques pour « L’unité »12 sur la table de la cuisine. A côté de l’habitat, il y a une clède13, restaurée en petit hébergement secondaire. C’est là que loge Mitterrand.

De ce pied à terre fiable et agréable, il mène sa découverte du pays. Il rencontre les habitants de Massevaques. Il s’intéresse à leur travail, il pose des questions. Parfois, il prend quelques photos, qu’il leur envoie ensuite.

Il se lie plus particulièrement avec quelques paysans des environs. Il y a Fernand Couderc, le berger transhumant, qui monte chaque été ses brebis depuis la plaine jusqu’à Massevaques. Mitterrand le rejoint parfois « garder » un moment avec lui, au pré appelé « quarante nuech », au dessus du hameau.

« Chaque année, Mr Couderc, il nous disait « Ah, mais il m’a fait sa visite, et puis il vient souvent me voir. J’aime bien parler avec lui ». Ils parlaient de la pluie et du beau temps, je crois, et ils parlaient un peu de tout, je pense. »

« Un jour qu’il était avec Fernand, une brebis a fait un petit agneau. Mitterrand a regardé la brebis, l’agneau, et tout ça. Quand il est parti, Fernand Couderc a gardé cet agneau et l’a appelé François. L’année d’après, quand Mr Mitterrand est revenu, il est remonté voir Fernand. Il lui a demandé à voir l’agneau. Fernand est allé dans le troupeau, y avait peut-être 1500 eu 2000 brebis, et il lui a ramené son François. Mitterrand a regardé comment il avait grossi, tout ça. Mais Fernand n’a jamais osé lui dire comment il l’avait appelé. »

Mitterrand invitera un jour Fernand à une réception officielle à Florac. N’étant pas très au fait du protocole, celui-ci ne jugera pas utile de se munir de son invitation. Lorsque le service de sécurité la lui demandera à l’entrée, il sera surpris. Il expliquera : « Mais enfin, je suis le berger de Massevaques, Mr Mitterrand m’a invité ! » jusqu’à ce qu’on le laisse finalement entrer.

Il y a aussi Maurice et Marguerite Gout, couple d’agriculteurs de Montcamp, ce petit hameau situé sur le sentier qui descend de Massevaques aux Vanels.

« La première fois qu’on l’a vu, il était avec Monsieur Salzmann. Ils descendaient à pieds aux Vanels et ils passaient sur le chemin au pied de la maison. Il m’a fait un signe de la main, il a juste dit bonjour, comme ça. Il n’était pas encore Président mais on l’avait souvent vu à la télé. Quand je l’ai reconnu, ça m’a surprise. J’en ai été émotionnée ! »

Une conversation clairsemée s’engage. Mitterrand pose quelques questions sur les bâtiments, les outils agricoles. Cette première entrevue n’est pas longue, mais les Gout le reverront souvent car la descente aux Vanels devient rapidement une étape incontournable des séjours de Mitterrand.

« Il passait toujours vers midi. A cette heure là on était souvent par là, autour de la ferme, alors on ne pouvait pas le rater. »

Chaque fois Mr Gout offre l’apéritif à son hôte illustre. Il ne se verse qu’une goutte de pastis, juste « pour troubler un peu l’eau ».

Et puis, au delà des environs de Massevaques, Charles et François sillonnent les petites routes des Cévennes. Charles Salzmann est propriétaire et conducteur d’une 2 CV camionnette, et c’est dans ce véhicule bien peu protocolaire (pourtant connu dans le monde entier, et véritable ambassadeur de la France !) que Mitterrand réalisa la plus grande partie de ses déplacements motorisés en Cévennes.

***

A force de bouger, sans chercher à se cacher, Mitterrand rencontre inévitablement des gens. Le pays résonne encore d’anecdotes croustillantes.

Yvan est à la chasse. La cartouchière en travers du torse, il avance sur un sentier des environs du Pompidou14. Au loin, un petit groupe de trois ou quatre personnes vient à sa rencontre. Ils se croisent avec les politesses d’usage. Quelques mètres plus loin, Yvan a comme un doute. Il s’arrête, se retourne, et lance :

  • Est-ce que je parle au Président de la République ?
  • Oui.

Une courte conversation s’engage, les hommes partagent des châtaignes à la pointe de l’opinel.

Autre rencontre de chasse. Gérard Serrière est à la recherche d’un de ses chiens qui est tombé dans le lit du Tapoul. En remontant à Massevaques, il croise Mitterrand qui est à la porte de la maison de Salzmann, et lui dit : « Vous êtes trempé, vous allez prendre froid, il faudrait vous changer ». Il l’invite à rentrer et lui prête des habits secs.

Il arrive que l’illustre visiteur ne soit pas reconnu. Un jour, une femme du pays interpelle Mitterrand alors qu’il passe dans la 2 CV de Salzmann :

– Ah, Monsieur, vous savez que si vous ne rouliez pas dans une 2CV, on pourrait vous prendre pour François Mitterrand, c’est incroyable comme vous lui  ressemblez !

Mitterrand, fidèle à lui-même, ne répond pas, laissant planer le doute.

Autre jour, autre lieu : un incendie de forêt gronde au col du Marquairès. Les pompiers de Florac sont montés. Un homme est là, il essaye de leur donner un coup de main. Un des pompiers l’observe et tout d’un coup s’énerve : « Qui c’est cet empoté, là, qui sait pas sortir le tuyau ? ». Mitterrand ne semblait pas très doué pour jouer les pompiers.

Ailleurs encore. Un gars monte en voiture vers Cabrillac. Un homme, en panne sur le bord de la route avec sa femme, l’arrête et lui demande :

– Pourriez-vous m’emmener chez madame Ansot15 pour que je puisse appeler un réparateur ?
– Bah, attendez, on va essayer de regarder ça, d’abord ! ».

En soulevant le capot le gars le dévisage et il dit :

– Mais, je vous connais, vous, je vous ai vu quelque part ?
– C’est possible, c’est très possible !

Le gars replonge dans le capot pour en resurgir aussitôt :

– Mais nom de dieu de nom de Dieu, je suis sûr que je vous ai vu quelque part !

La scène se répète. Lorsque, malgré son trouble, le gars réussit à réparer la voiture, l’homme lui dit : « Je vous remercie, arrêtez-vous donc chez madame Ansot, on boira un pot ! »

Arrivé chez madame Ansot, il lui raconte « Je me suis arrêté pour dépanner un Monsieur qui était en panne ! » Madame Ansot lui répond « Mais c’était Monsieur Mitterrand ! »

Le gars, paraît-il, s’est trouvé tout bête, il n’a pas osé boire un coup avec lui, il est parti en douce !

Autre souvenir : « Il y avait ce gars qui habitait dans un tipi, là-haut à Montcamp… Un prof de philo. C’étaient des gens un peu marginaux, un couple, ils ont eu un bébé qui est né là-haut, parce qu’aucun docteur n’a voulu y aller et elle ne voulait pas aller à la clinique, mais ça ça n’a rien à voir. Un jour ils étaient là-haut et Mitterrand est passé. Après le gars il a dit à ceux de montcamp : Ya un gars qu’est passé, vraiment on aurait dit Mitterrand ! Hé ben oui, c’était lui, a répondu Mr goût. Le gars était sidéré. »

Une rencontre sur un mode un peu différent : « Un jour que Mitterrand mangeait à l’auberge des Vanels, s’y trouvaient par hasard les enfants de Michel Rocard, qu’il ne connaissait pas (Rocard avait été marié en première noce avec une femme d’une famille originaire de Vebron). La patronne madame Ponge racontait de façon savoureuse comme elle les avaient présentés, alors que c’était la période ou il commençait à y avoir des tensions entre les deux hommes politiques.« 

La famille

De temps à autres, Mitterrand vient à Massevaques accompagné d’une femme. Il la présente comme sa secrétaire. Les gens du pays le croient volontiers : pourquoi en serait-il autrement ? Il s’agit en fait de la seconde femme de sa vie, Anne Pingeot. Leur relation adultère est à l’époque encore inconnue des français, ils ne se voient que dans des lieux discrets16. Massevaques constitue l’un des écrins de tranquillité dans lesquels il peuvent vivre librement de courts fragments de cette vie cachée.

« Cette fois là j’étais dans le jardin, et puis mon mari était en train de faire un mur. J’entends le chien aboyer. Je regarde, j’arrive avec le tablier, j’avais une salade dedans. Je vois Mr Salzmann qui me dit « Madame Gout, voici Monsieur Mitterrand ». Il y avait aussi cette petite. Elle avait 5 ou 6 ans ? Mon mari les a invités à boire l’apéritif, la petite a bu un sirop. »

Mazarine accompagne plusieurs fois ses parents à Massevaques. Au début des années 80 les français ne connaissent pas encore son existence et les habitants des environs sont parmi les premiers à la rencontrer, bien avant que les médias ne racontent son histoire. Ils la considèreront tout d’abord comme « la fille de la secrétaire », car c’est ainsi que son père la présente. Personne ne remet en cause cette version somme toute plausible, jusqu’à ce que…

Mitterrand au col de Porte avec Mazarine sur les épaules

Un jour, alors que Mazarine a 3 ou 4 ans, un des habitants de Massevaques surprend une conversation entre elle et Mitterrand. Au détour d’une phrase, il entend distinctement la fillette prononcer les mots « Dis, papa… ». Très surpris, il s’en ouvre à ses voisins : « Me saïd pas ? Ieu ditch papa ! »

« Après, ça s’est répété dans le village et à partir de ce moment ils se sont doutés de quelque chose. [Une habitante] m’a dit :  » Tu vois cette Mazarine ? Elle est superbe. C’est la fille à François Mitterrand ! « »

Passées les interrogations, la présence de Mazarine devient habituelle aux gens du pays.

« Une fois ils se sont arrêtés devant la maison parce que Monsieur Salzmann il voulait prendre son miel, qu’il prenait chez nous. Dans la voiture il y avait la petite Mazarine ainsi que la maman, Mme Pingeot.»

Mazarine semble tout à fait à son aise dans la nature cévenole.

« Une fois, elle avait 7 ou 8 ans. Quand elle est arrivée à Montcamp elle avait le visage tout barbouillé de myrtilles. Mitterrand a dit à Mme Pingeot, la secrétaire, la mère de la petite, de la laver avant de repartir. Je lui ai donné une cuvette, et elle lui a nettoyé le visage sur un coin de la table de la cuisine. »

« Une fois, on avait une chatte sur le balcon, qui avait des petits. Il y en avait un tout blanc et Mazarine le voulait. Quand ils ont eu mangé aux Vanels, Mitterrand a envoyé son chauffeur avec Mazarine, pour venir le chercher. Mais le petit chat blanc on ne savait pas ou il était passé, alors elle a pris un blanc et noir. On l’appellait Zaza. Alors le petit chat est parti à Paris. Mais il est pas resté chez Mitterrand, c’est Madame Salzmann qui l’a gardé, et chaque fois qu’elle venait à Massevaques elle amenait zaza, et elle venait nous le faire voir. Elle l’a gardé 14 ou 15 ans. »

Dans le pays, on résume cette aventure avec fierté : « Ya un chat de Montcamp qui s’est établi à l’Elysée ! » Et on ajoute : « Si elle revient dans le coin, j’ai des petits chats, si elle veut pour ses enfants je peux lui en donner un. […] Moi je crois qu’elle reviendra.»

Charles Salzmann

C’est pendant la seconde guerre mondiale que Charles Salzmann a fait connaissance avec les Cévennes. Comme de nombreux autres juifs, il est venu avec sa famille se mettre au vert dans ces petites montagnes si propices à la discrétion. Il en a gardé une tendresse pour ce pays et ces habitants qui l’avaient aidé, et dès qu’il pourra, il y achètera le pied-à-terre de Massevaques.

Dès le début des années 70, Salzmann devient l’un des proches de Mitterrand, qui lui demande de le conseiller sur les aspects liés à l’image et la communication. Mais la relation qui s’installe entre eux dépasse largement le cadre professionnel. Anne Pingeot n’est enceinte que de cinq mois lorsque Mitterrand lui apprend, comme à quelques très rares intimes, qu’il attend un enfant avec une autre femme que la première dame de France. Et puis il y a toute la singularité de la relation champêtre qui se noue en Cévennes.

« Notre amitié fut ainsi colorée par nos conversations lors de longues marches dans les drailles, dans l’odeur des genêts et la recherche de cèpe. Le soir, devant un feu de hêtre, grillant des châtaignes, nous avons appris à vraiment nous connaître… du moins les événements de nos vies respectives, car il fut, et est resté, considérablement secret. »17

Politiquement, Charles et François sont d’accord sur presque tout, mise à part la relation avec le parti communiste. Salzmann, farouchement antisoviétique, pense qu’il faut s’en tenir à l’écart, alors que Mitterrand souhaite s’en rapprocher pour augmenter ses chances aux élections présidentielles de 1974.

« Je me souviens [en 1974] d’une matinée de vacances dans les Cévennes. Il [Mitterrand] passait quelques jours chez moi et m’avait demandé de le conduire à mon reboisement, près du Pompidou (eh oui, la vie a de ces ironies !). Je conduisais ma camionnette 2 CV qui  sentait bon le bois de hêtre et les genêts séchés que nous avions ramassés la veille pour alimenter la cheminée. Le soleil éclatant des matins cévenols m’emplissait comme toujours d’une joie déchirante. J’avais au cœur un sentiment de gratitude que la nature fût si belle. Nous roulions en silence sur ces routes de montagne à lacets serrés, à travers le violet des bruyères et le gris des schistes. Mitterrand, d’une voix douce, me demanda si je le pensais si naïf ou manquant de caractère pour se faire berner par les communistes, un nouveau Kerenski en somme ? Je l’assurai de ma confiance, mais j’ajoutai : ‘Je crains qu’une fois que vous les aurez installés au pouvoir avec vous, et si vous ne faites pas leur politique, ils ne vous fassent subir le sort de Bernes et Masaryk’ » 18

Ce différend, discuté sur une route des Cévennes, est suffisamment profond pour que Salzmann décide de ne pas assister Mitterrand dans sa seconde campagne présidentielle. Le 19 mai 1974, Mitterrand est finalement devancé par Valéry Giscard d’Estaing, au cours du scrutin le plus serré de la Vème république. Qui sait si, avec les conseils de Salzmann, il n’aurait pas gagné le 1% de voix qui lui manquèrent ce jour là ?

Cette mésaventure n’obscurcit pas les relations entre les deux hommes. Mitterrand continue ses voyages à Massevaques. Dans les années qui suivent, Salzmann finit par se ranger au point de vue de Mitterrand concernant le PC, et il décide de l’aider en vue de l’élection de 1981. Les séjours cévenols s’émaillent de moments de réflexion et de travail destinés à affiner les stratégies de communication.

En août 1980, Salzmann écrit à Mitterrand depuis Valleraugue : « Cher François, espérant que vous passez de bonnes vacances, je pense évidemment à vous, alors que je contemple le bas des 4000 marches, n’osant vraiment pas me lancer dans une ascension – où pourtant je perdrai deux kilos« 19. Après cette aimable introduction cévenole, Salzmann dévoile à Mitterrand ses pronostics concernant l’élection à venir. Il lui affirme que s’il joue finement, il battra Giscard au second tour par 52% des voix contre 48%.

Salzmann va même au delà de la statistique : il prodigue des conseils. Si Mitterrand veut atteindre ce score il doit avant tout travailler son image, qui est encore celle d’un « ambitieux trop habile« . Dans une note de novembre 1980, il lui suggère de mettre en avant trois aspects de sa personnalité :

« Terrien : homme de terre, racines paysannes.

Force intérieure : médite longuement, s’isole face à la nature, puise dans l’idéal un surcroît de force.

Volontaire : s’est évadé trois fois20, la troisième fois fût la bonne. Il en sera de même pour les présidentielles.« 21

Il est révélateur de constater combien les deux premiers de ces traits sont en prise directe avec ce que Mitterrand vient chercher au contact des Cévennes et de ses habitants. Sans doutes ses séjours à Massevaques vont l’aider à endosser encore mieux ce personnage, qui lui correspond intimement mais qu’il a besoin de mettre en scène pour que les français reçoivent parfaitement le message.

Un peu plus tard, en février 1981, Salzmann fait évoluer « force intérieure » en « force tranquille ». Ce slogan, on s’en souvient, a marqué les esprits, et tint probablement un rôle dans la victoire22.

Après son accession à la Présidence, Mitterrand propose à Salzmann un poste de conseil en sondages et communication. Celui-ci accepte. Pendant huit années, il assistera le Président en France et dans de très nombreux pays où il l’accompagnera à l’occasion de voyages officiels. Il rencontrera de nombreux grands de ce monde. Il quittera finalement le poste de conseiller en 1989, estimant avoir apporté ce qu’il pouvait à la présidence. Pour le remercier, Mitterrand le nommera à la Présidence du conseil d’administration de la Société concessionnaire française pour la construction et l’exploitation du tunnel routier sous le Mont-Blanc.

Mitterrand président

Le 10 mai 1981, Mitterrand devient Président de la République, avec 51,76% des voix. A 0,24 % près, Salzmann a vu juste : la force tranquille l’a emporté !

Pour les cévenols qui l’ont rencontré et sont fiers de le connaître, c’est une grande surprise, un vrai bonheur.

« J’ai jamais pris qu’une cuite, c’est celle-là, c’est le jour qu’il a été élu Président. La seule et unique. J’en ai pas fait avant, j’en ai pas fait après. Une cuite, une vraie ! »

Le nouveau Président ne modifie pas pour autant son habitude de venir régulièrement en Cévennes. Lors du séjour qui suit son élection, il croise Mr Gout de Montcamp. Ils se connaissent depuis longtemps, mais celui-ci, impressionné, demande :

– Comment je dois vous appeler, maintenant ?
– Comme avant, tout simplement. Appelez-moi Monsieur Mitterrand, répond l’intéressé.

Son nouveau statut complique quelque peu les choses. Un Président de la République ne peut pas se déplacer seul. A chacune de ses visites, deux grosses voitures grises sont garées en permanence dans massevaques, de part et d’autre de la maison où il loge. Dedans, des agents de sécurité veillent.

« Ils n’étaient pas abordables, les gardes du corps. […] Un jour, papa avait parlé à un garde, il lui avait dit « Alors, on vient faire la visite annuelle ? ». Il était monté dans sa voiture, il voulait pas [lui] parler. On sentait qu’ils avait l’ordre de ne pas… »

Les grosses voitures grises parcourent à toute vitesse les petites routes des Cévennes pour préparer ou sécuriser les séjours du Président. Elles attirent d’ailleurs beaucoup plus l’attention qu’il ne le souhaiterait lui-même.

Le moindre déplacement engendre une étonnante procession : la 2CV de Monsieur Salzmann ouvre la route, avec le Président à la place du mort. Arrive ensuite la voiture officielle, occupée par le seul chauffeur. Le convoi est cloturé par le 4X4 des gardes du corps. Les gens du pays observent avec amusement.

Pour rallier les Cévennes, il a cependant régulièrement recours à un véhicule plus voyant : l’hélicoptère, qui lui permet de gagner un temps précieux sur un planning très chargé.

« Un jour il était là, à Montcamp, comme d’habitude il avait bu l’apéritif, avec un millimètre de pastis au fond du verre. A quatre ou cinq heures il prenait l’hélicoptère à Perjuret. Et le lendemain on l’entendait à la radio, il dinait à Berlin. »

A chaque arrivée, l’ami Salzmann est là, pour recevoir son invité au pied de l’hélicoptère et l’emmener dans sa 2CV.

Les lieux de dépose ou de départ changent régulièrement, sans doute au gré des objectifs, ou pour des impératifs de sécurité. La can de l’Hospitalet, ce plateau désertique tout proche, constitue un terrain idéal pour accueillir relativement discrètement cet engin bruyant et son illustre passager.

« Des amis à nous, les Blachère, étaient assis sur des fauteuils pliants [sur la can de l’Hospitalet]. Ils te voient cet hélicoptère et ils se disent « Qu’est-ce-qui se passe ? ». Tac ! Ils te voient mon Mitterrand qui descend !».

Souvent, les autorités locales ne sont pas averties, ce qui donne lieu à des scènes cocasses. « La haut au dessus il y avait un hélicoptère posé dans une prairie. Les pales tournaient encore. En passant en voiture les gendarmes l’ont vu et ils étaient pas au courant. René, le beau fils des Martin de Carnac, qui était gendarme, est descendu pour aller voir. La porte s’ouvre, quelqu’un descend. Et puis ils tombent nez à nez avec Mitterrand, alors ils ne savaient plus comment faire. « Il m’a tendu la main, j’ai serré la main », mais il savait pas s’il devait le saluer militairement.»

La photo décrite en introduction rapporte une scène du même type. Les gendarmes de Barre-des-Cévennes avaient aperçu l’hélicoptère de loin. Accourant sur la can de l’Hospitalet pour vérifier que rien d’anormal ne se passait, ils étaient tombés sur leur chef suprème23 et, comme le raconte avec humour l’agriculteur propriétaire des terres, étaient restés pétrifiés au garde-à-vous sans oser broncher. Depuis, lorsque madame demande « Je vais nourrir les bêtes, tu sais où elles sont ? », monsieur répond parfois « Au pré à Mitterrand ».

Le Président doit rester joignable à tout instant. En cas d’urgence nationale, comme un accident nucléaire ou une déclaration de guerre, il serait très gênant que l’on n’arrive pas à l’avertir ! La ligne téléphonique de Mme martin ne doit plus inspirer une confiance suffisante à l’équipe chargée de suivre le Président car lors de chacun de ses séjours, un véhicule de transmission bardé d’antennes est installé sur les hauteurs de Massevaques, prêt à établir une liaison radiophonique avec l’Elysée.

« Une fois il y a eu une réunion des Ministres à Massevaques. Il y a deux ou trois ministres qui sont venus, c’est à dire qu’il y avait plusieurs hélicoptères qui ont circulé. Et notamment il y avait Georgina Dufoy. Moi je l’ai revue, je lui ai parlé, ensuite. Ben oui, parce qu’elle était de Nîmes ! »

Même la traditionnelle descente à l’auberge des Vanels se complique. Une voiture grise rôde à l’avance dans les environs puis attend les marcheurs à mi-parcours, à Montcamp, pour vérifier que tout est en ordre. Un agent de sécurité les suit de loin sur le sentier. Ces mesures de sécurité restent, malgré tout, assez peu contraignantes, sans doute insuffisantes pour réellement protéger le Président d’une attaque bien préparée sur cet itinéraire qu’il emprunte régulièrement, et sur le bord duquel il aurait été si facile à un tireur isolé de se cacher.

A l’auberge, deux agents mangent à sa table avec sa famille et ses amis. Avant la fin du repas, ils sortent voir si tout est en ordre.

Mitterrand et les cévenols

Dans sa vie publique, Mitterrand met sans états d’âme la puissance de la parole au service de ses ambitions. Pour séduire, punir, récompenser, forcer, il n’hésite jamais à parler de manière lyrique ou grandiloquente, mais également à mentir, à travestir, à omettre, à laisser croire. « Le président veille toujours à rester insaisissable. Il ne fait jamais ce qu’il dit. Il ne dit jamais ce qu’il fait. Il ne se dévoile que très rarement, et à bon escient. Entre-temps, il se barricade avec soin derrière les silences, les amphigouris ou les contrevérités qu’il profère, avec une tranquille effronterie, pour brouiller les esprits »24

Lorsqu’il est en Cévennes, il est tout le contraire : il ne cherche plus à embrouiller ni à manipuler ses interlocuteurs.

« Il parlait pas beaucoup, il « allongeait » pas. Il répondait aux questions, oui, non, comme ça, mais pas trop plus. »

« Il était pas imposant. Il était pas bavard, il disait rien. Il répondait, mais c’était pas une grande gueule, quoi. »

C’est bien simple, en Cévennes il ne parle presque plus. Lorsqu’il rencontre des cévenols, le plus souvent, il se contente de répondre aux questions. Et si parfois il en pose quelques-unes lui-même, elles portent sur des sujets anodins : la météo, la prochaine récolte, la manière dont poussent les patates. Les conversations, en apparence banales, démarrent par les petites nouvelles de la vie et s’épuisent rapidement, en « oui » songeurs adressés à personne.

« Et nous, on lui a peut-être pas tellement parlé non plus, sans doute. Si on avait su qu’il serait président après, on lui aurait peut-être plus parlé du tout, qui sait ? Mais on savait pas ! »

« Il ne parlait pas beaucoup. Nous non plus. Peut-être qu’on ne lui parlait pas plus que ce qu’il fallait. On était quand même impressionnés, parce que c’était quand même pas le commun des mortels. Mais il te faisait pas de réflexions. »

Les cévenols, c’est un fait établi, ont la parole rare en toute circonstance. Impressionnés par le personnage, ils s’avèrent carrément mutiques. Dès ses premiers séjours cévenols, dans les années 60, Mitterrand est célèbre : il a déjà été député, sénateur, premier secrétaire du parti socialiste, plusieurs fois Ministre, et deux fois candidat à la Présidence (1965 et 1974), excusez du peu ! Les gens n’osent guère mener la conversation plus avant que ce que lui-même décide. Il règne donc une certaine « entente du silence » entre Mitterrand et les cévenols.

Ce caractère « taiseux » des habitants fait l’affaire de l’homme public, qui tient à sa tranquillité. « Les habitants de Massevaques ? Ils étaient muets comme des tombes !« , raconte une habitante de Rousses. Lorsque des journalistes viennent les interroger pour essayer d’obtenir des informations sur l’illustre visiteur, ils doivent se contenter d’informations très imprécises, quand on ne leur répond pas carrément : « Mitterrand ? Non non, il n’y a personne de ce nom là par ici ! »

La capacité à tenir sa langue est d’ailleurs une fierté locale. « En Cévennes, à l’époque, les gens quand ils tenaient un secret, attention, hein, c’était top secret. Ce serait impensable aujourd’hui, il y aurait France machin et 40.000 journalistes… Ce silence, c’est historique. Ici il y a toujours eu des gens qui ont caché des juifs, qui pendant la guerre n’ont pas dénoncé les autres… je pense que ça tient à ça ! »

Taiseux pour taiseux, dans les rares échanges entre Mitterrand et les cévenols, un sujet, en particulier, est toujours soigneusement évité :

«On lui parlait pas de politique, parce que lui il faisait de la politique à une échelle autre que la nôtre.»

Les Cévennes sont, traditionnellement et depuis « toujours », acquises à la gauche. On aurait pu imaginer que les discussions politiques iraient bon train entre les cévenols et cet homme qui portait leurs idées au plus haut niveau. Mais Mitterrand vient en Cévennes précisément pour s’éloigner de la politique. Ceux qui l’ont approché ont rapidement compris qu’il n’était pas opportun de s’aventurer sur ce terrain.

Parfois, abandonnant pour quelques instants sa réserve, le futur Président se laisse aller à un trait d’humour :

« De temps en temps, il parlait avec un petit sourire. Ça voulait sans doute dire quelque chose. Une fois y avait mon beau frère par les escaliers. Il faisait bien chaud, alors il avait quitté le chapeau et il le tenait à la main. Mitterrand lui a dit : « Monsieur, couvrez vous, couvrez-vous. C’est pas parce que je suis là que vous devez enlever le chapeau ! » (rires) »

En de rares occasions, le contact se fait plus familier, et fait la fierté de ceux qui le vivent :

« C’est pas de l’orgueil, je n’en ajoute pas. Un matin, j’avais 17, 18 ans, je vais chez Monsieur Salzmann (je faisais des ménages chez lui) et il me dit « Tu vas déjeuner avec nous » (il me tutoyait). Je dis « Non merci ». Alors Mitterrand avait dit « On t’a gardé des éclairs au chocolat ». J’avais eu droit à mon éclair au chocolat au petit dej’. Ca m’est resté, ça ! Une fois, en revenant de travailler chez les Salzmann, il n’y avait personne pour me redescendre, et je suis descendue avec les gardes du corps. Arrivée à Rousses, il y avait madame M. devant la porte, qui pensait qu’il y avait Mitterrand qui allait passer. Mais c’était moi ! Je lui faisais bonjour. On en a bien ri de ça ! […] A Noël il m’envoyait des chocolats. Chaque fois c’était signé Mitterrand et Salzmann »

Si la parole qui lie Mitterrand aux cévenols est rare, elle est constante et fidèle. Chaque fois qu’il le peut, Mitterrand repasse visiter ses principaux interlocuteurs, leur témoignant ainsi sans ambiguïté l’intérêt et l’affection qu’il leur porte. Les cévenols sont sensibles à cette fidélité. Et puis, ils apprécient sa simplicité.

Quand il est à Massevaques, François Mitterrand redevient un homme ordinaire. Ce qu’il souhaite avant tout, c’est vivre normalement, loin de l’étiquette. Il côtoie sans cérémonie les habitants des environs et il vit leur vie.

« Quand il allait manger aux Vanels il ne se faisait pas mettre à part, il mangeait dans la salle, avec tout le monde. Il avait dit à la patronne « Vous me mettez avec tout le monde. » »

« Il aimait beaucoup les champignons, alors elle lui en faisait souvent. Il lui disait « O, vous m’avez gâté avec ces champignons ». C’était des Cèpes, en Cévennes quand on parle de champignon c’est les cèpes. »

« Ou je l’avais admiré, c’était avec le saucisson. Il y avait un gros saucisson, un jésus, comme on appelait ça ici. Il s’était coupé une tranche, deux tranches, il les a mangées comme ça, avec ses doigts, sans regarder s’il y avait une serviette pour s’essuyer ! »

« Il était simple, gentil. Il ne faisait pas de complications. »

« La seule chose importante, dans une auberge, c’est la cuisine. Si les gens ils aiment pas la cuisine, ils reviennent une fois, mais pas deux. Lui, il revenait à chaque fois »

« Il passait avec un pantalon en velours, il passait pas en costume. Comme vous et moi, quoi. »

«Quand il était là, il s’enlevait de la politique, il était vraiment le bonhomme… on pouvait pas le savoir. Il parlait beaucoup avec sa petite, sa fille que je savais pas que c’était sa fille. »

« Il mangeait ce qu’on lui mettait sur la table, il regardait même pas ce qu’il y avait à manger. C’était pas un homme difficile… »

Le pré du Terron, un lieu où Mitterrand passait souvent en promenade

Si Mitterrand ne demande pas de traitement particulier, les cévenols lui portent tout de même une attention spéciale. A l’auberge des Vanels, il demande à manger comme tout le monde et croit être entendu, mais la patronne le gâte sans lui dire :

« Un jour, c’était un lundi, j’arrive à l’auberge avec un groupe de catalans. Je demande s’il y a assez pour le nombre qu’on était. Elle me dit : pas de problème, et elle nous amène des quantités incroyables de sanglier et de bonnes choses. Je lui demande comment ça se fait qu’il y a tant de plats préparés un lundi, elle me répond « Oh, ce sont les restes de François« . Alors il y a un catalan qui a demandé « C’est qui, François ?«   »

Certains s’efforcent même de protéger son intimité, alors qu’il ne le demande pas.

« On était montés avec ma mère au troupeau pour chercher du fumier. On s’était arrêtés chez madame Martin pour acheter du fromage au passage. Pendant qu’on était dans la maison, Mitterrand est arrivé pour passer un coup de fil. Je me souviens, devant la porte je l’ai vu rattacher son lacet de soulier. Je me suis dit « Chouette, on va pouvoir parler un peu avec Mitterrand ». J’étais contente parce que j’avais envie de l’inviter à descendre à Rousses un de ces jours pour organiser un moment convivial avec les habitant. Mais madame Martin, quand elle nous a eu donné nos fromages, elle nous a fait sortir par la porte de derrière pour ne pas qu’on le croise. Je n’ai jamais eu d’autres occasions de le croiser, hélas ! »

Le contact est donc plutôt bon entre Mitterrand et les cévenols. L’un d’eux résume cette relation d’une phrase bien sentie : « Machiavel est toujours sympathique »

***

Lorsque, le 22 mars 1988, François Mitterrand annonce sa candidature à sa propre succession, il sait depuis longtemps25 qu’il est malade, atteint d’un cancer de la prostate. Comme à son habitude, il a voulu rester maître de son image. Donner cette information aux français l’aurait fait paraître affaibli, et il ne l’a pas souhaité. C’est donc en faisant mine de rien qu’il va prendre sa propre succession à la tête de l’état, alors que sa santé se dégrade, et que la douleur monte, jusqu’à atteindre des niveaux difficilement supportables.

Il viendra encore un ou deux fois à Massevaques, pour y vivre des séjours plus confinés. La longue descente à l’auberge des Vanels n’est plus à sa portée, il devra se contenter de courtes sorties aux alentours. Charles Salzmann, qui le sait condamné, garde un souvenir douloureux de ces promenades cévenoles qu’il sait être les dernières.

Les dernières années de son règne s’achèveront sans qu’il revoie ses chères Cévennes. Il meurt le 8 janvier 1996. Charles Salzmann meurt le 22 juin 2009.

Finalement

Mitterrand était un grand amoureux de la France et de ses terroirs. Il les a souvent parcourus officiellement, en tant que premier secrétaire du PS, Ministre ou Président. Il a également abrité ses escapades privées dans de nombreux lieux plus ou moins connus du grand public.

En tant que Président, il a bien sûr fréquenté le fort de Brégançon, Rambouillet, Marly-le-Roy… Ces lieux, adaptés pour recevoir les Présidents en exercice, étaient très pratiques. Accessibles, surveillés, protégés, équipés du nécessaire de communication pour parer aux imprévus, ils facilitaient l’organisation de séjours au calme, tout en restant proche de la fonction.

Mitterrand préférait cependant passer son temps libre dans des lieux plus simples, qui avaient pour lui un sens plus profond. Il retournait régulièrement dans les fiefs familiaux, à Jarnac en Charentes (sa ville natale), ou bien à Cluny en Saône et Loire (village familial de sa femme Danièle), ou il retrouvait aussi les compagnons de résistance. Il séjourna encore plus souvent sa propre maison secondaire, à Latché dans les Landes, pour passer des vacances privées mais presque officielles puisque souvent médiatisées. Il y était régulièrement accompagné d’amis politiques, voire de chefs d’état.

Tous ces territoires l’ont profondément marqué, et par sa fidélité à y retourner souvent, il les a marqués en retour. Il n’en fait pas secret. Il les évoque dans plusieurs écrits autobiographiques.

Lorsqu’il voulait vraiment se retirer du monde, il lui fallait aller encore ailleurs. En des lieux plus reculés, plus discrets. Il y en avait au moins deux. A Gordes, dans le Vaucluse, il était copropriétaire d’une maison – dont l’existence resta cachée jusqu’à sa mort – dans laquelle il se rendit souvent avec Anne Pingeot et Mazarine. Et puis il y avait Massevaques. Cette retraite cévenole semble être restée totalement à part dans son esprit. Il n’y reçut quasiment jamais d’invités, il n’en parla dans aucun de ses écrits officiels. On pourrait imaginer que ce silence cache quelque secret. Il n’en est sans doute rien. Massevaques représentait tout simplement pour Mitterrand le contact direct, sans intermédiaire, avec la nature et le monde rural. Ici, et ici seulement, il pouvait être l’homme plutôt que le politique, mener une conversation parfaitement ordinaire et banale avec une personne croisée dans la rue ou sur un sentier.

Les 24 et 25 juin 1985, pendant son premier mandat présidentiel, il effectue un unique voyage officiel en Cévennes. Au Vigan, à Alès, à Mende, ses discours sont pointus, techniques. Il y parle politique, Europe, Marché Commun…. L’arrêt qu’il fait à Florac, à quelques kilomètres de sa retraite de Massevaques, est différent. Le discours qu’il prononce dans cette petite cité est court, exempt de considérations politiques. C’est le cœur qui parle :

[…] C’est un pays de lutte par ici. Il faut avoir lu la littérature de ces siècles derniers pour savoir que cette population, fière d’elle-même, désireuse d’assumer la liberté de sa pensée, a su affronter les pires périls. Mais tout cela a été payé cher et tout ce qui peut composer le paysage humain de la Lozère et, en particulier, des Cévennes, a présenté un effort quasiment surhumain dans lequel se sont perdus beaucoup des vôtres. Vous avez raison de le dire, la nature est restée intacte, vous avez su la protéger. Elle était, elle aussi, menacée et la source d’intérêts est considérable. Vous avez bien voulu le rappeler, chaque année je viens me promener par vos chemins, à la fin de l’été et il n’est pas de pays, en dehors de mon pays d’origine que j’aime pour les raisons que l’on devine, qui ait davantage attaché mon goût de la France. Nous venons de survoler, du Vigan jusqu’ici, ce pays fort admirable mais, en même temps, nous avons pu constater la destruction de l’habitat ancien. Il était facile d’apercevoir de quelle façon l’homme s’était retiré d’un certain nombre de vallées ou de plateaux. […] On vient d’un peu partout jusqu’ici. On n’y reste pas, l’hiver est dur, c’est du tourisme passager trop souvent. Mais il n’y a pas que cela. Vous avez les vallées, vous avez les rivières, vous avez les richesses de la nature, comme on dit de « l’environnement26« . […] J’aurai fait un grand parcours, beaucoup de haltes, celle-ci restera dans ma mémoire, en tout cas dans ma mémoire affective. […] Merci à vous, habitants de Florac et de la région, vos très belles rivières, leurs confluents, cette « Fleur des eaux », cette petite cité logée dans l’anfractuosité des Causses avec l’Aigoual de l’autre côté, croyez-moi, c’est une partie de la France à laquelle je tiens. Il faut qu’elle vive, on va s’y appliquer tous ensemble. »27

Voilà un long et lyrique développement de l’expression « Un pays rude mais beau » que Mitterrand avait employée avant de monter dans son hélicoptère sur la can de l’Hospitalet. Ce sont cette rudesse et cette beauté, tant des paysages que des gens qui vivent là, qui lui parlent et qui le touchent.

***

Mitterrand a aimé les Cévennes. Les Cévennes le lui ont largement rendu. Dans ces années d’immense espoir, alors qu’une partie de la France attendait de le voir arriver au pouvoir, il ne pouvait pas être mieux accueilli que dans ce petit pays dont la tradition politique est à gauche depuis toujours.

Voir cet homme connu, admiré, choisir leur petit pays pour venir se ressourcer a représenté une grande fierté pour les cévenols. Le voir arriver à la tête de la France encore bien plus. Dans les années qui suivirent l’élection de 1981, malgré quelques avancées sociales significatives, les gens de gauche comprirent peu à peu que la gauche ne pouvait pas tout. Mais les cévenols restèrent fidèles à Mitterrand, l’homme, qui avait su les comprendre, plus encore qu’à l’homme politique. On en parle encore dans les hameaux cévenols… et on en parlera encore longtemps.

« Il a fait sa vie et… nous faisons la notre. »

Au dessus du hameau des Ablatats, tout près de Massevaques, les hasards de la morphogenèse ont donné à la crête rocheuse le profil d’un visage. Le front fuyant, le nez aquilin, les lèvres fines et pincées font sans hésiter dire aux habitants des environs :

« Regardez : C’est Mitterrand ! »

Le profil

Sources, remerciements

Le texte qui précède est en évolution permanente. J’espère que sa lecture ravivera des mémoires, et fera ressurgir de nouveaux souvenirs, de nouvelles anecdotes, qui viendront l’enrichir. Si c’est votre cas, n’hésitez pas à me contacter.

Les témoignages rapportés dans ce document ont été apportés par Eliette Valat (Rousses), Alain Argenson (Rousses), Annick Argenson (Rousses), Maurice et Marguerite Gout (Montcamp, Rousses), Lucette Ponge (Les Vanels, Vébron), Claude Espinasse (Ispagnac), Gérard Serrière (La Salle Prunet), Marie-Lise Rouquette (Prat-nouvel, Rousses), Guy Bazalgette (Les Crottes, Bassurels), Robert Chaze (Massevaques), Jean-Paul Martin (Florac), Joël Chaptal. La photo d’époque a été prêtée par Guy Bazalgette. Je leur adresse à tous mes remerciements chaleureux. Les photos d’aujourd’hui sont de moi-même.

J’ai également trouvé dans les ouvrages suivants des éclairages complémentaires :

  • Mitterrand, une vie, Franz-Olivier Giesbert, Editions du seuil, mai 1996
  • Le bruit de la main gauche, Charles Salzmann
  • La paille et le grain, François Mitterrand
  • L’abeille et l’architecte, François Mitterrand

Merci à Sophie Lemonnier pour ses relectures, ses conseils, et le lien avec les habitants de Rousses.

Notes

1 « Une rose au paradis », que vous pouvez lire sur internet

2 Charles Salzmann est à l’époque directeur du CFRO (Centre Français de Recherche Opérationnelle), l’organisme qui a réalisé l’étude

3 Comme beaucoup d’autres juifs, Charles Salzmann a découvert la région pendant la guerre : il avait été caché aux Ablatats (un hameau de Rousses) par le pasteur.

4 Le bruit de la main gauche, Charles Salzmann, p. 25

5 La paille et le grain, p. 29

6 L’abeille et l’architecte, P. 294.

7 Débats télévisés, prise de décisions importantes…

8 Peu de temps après la seconde guerre mondiale, quelques amis ex-résistants bourguignons – dont Mitterrand – prirent l’habitude de se retrouver à la Pentecôte pour faire l’ascension de cette colline. La tradition fût hélas rapidement dénaturée par la présence envahissante de personnalités médiatiques ou politiques

9 La paille et le grain, p. 151. Ce récit ne se déroule pas sur l’Aigoual, mais non loin de là, sur le Causse du Larzac, ou Mitterrand avait pour ami l’historien et écrivain Claude Manceron auquel il rendait visite régulièrement. Comme Charles Salzmann, Claude Manceron fût conseiller auprès du candidat puis du Président Mitterrand. Petit détail croustillant, le Rajal del Gorps auquel il fait allusion est l’endroit précis où se déroulèrent plusieurs rassemblements mythiques lors de la lutte des paysans du Larzac contre l’extension du camps militaire, entre 1971 et 1981. Lui-même y sera sérieusement bousculé en août 1974 alors qu’il assistait secrètement à l’un d’eux. Je n’ai pas réussi à déterminer si le récit bucolique qu’il fait ici se déroule avant ou après le rassemblement.

10 La paille et le grain, p.25

11 Cet vision embellie de la France rurale a fait dire à ses biographes que sur ce point Mitterrand était en accord avec l’idéologie de Vichy. Il est effectivement de notoriété publique qu’avant 1942 le futur homme de gauche a un peu cherché sa voie politique, approchant d’assez près la droite nationaliste.

12 Revue créée par le parti socialiste en 1972. Mitterrand en était le plus prestigieux collaborateur. Sa chronique, « Ma part de vérité », donna au journal une audience importante

13 Petit bâtiment à deux pièces autrefois destiné à faire sécher les châtaignes.

14 Sans doute Charles Salzmann avait-il emmené Mitterrand visiter la plantation de pins qu’il possédait dans les environs du Pompidou.

15 Gestionnaire de l’auberge « Les hauts de hurlevent » à Cabrillac, où paraît-il les hommes politiques allaient manger

16 Cette liaison, et l’existence de Mazarine, ne seront officialisés qu’en 1994. Lorsque Mitterrand devient Président, à Paris tout est organisé pour qu’il puisse discrètement vivre une double vie. Un appartement est dédié à sa seconde famille, des agents de sécurité se consacrent à leur protection.

17 Le bruit de la main gauche, Charles Salzmann, p. 27

18 Le bruit de la main gauche, Charles Salzmann, p. 27

19 Le bruit de la main gauche, Charles Salzmann, p. 55

20 Le 18 juin 1940, Mitterrand est fait prisonnier par les allemands. En dix-huit mois de captivité il s’évadera trois fois, mais sera repris deux fois avant de pouvoir rentrer en France.

21 Le bruit de la main gauche, Charles Salzmann, p. 64

22 A partir de 1980, Mitterrand travaille la communication de la présidentielle avec un homme autrement plus médiatique que Salzmann : le publiciste Jacques Séguéla, qui a comme Salzmann rapporté des Etats-Unis une nouvelle vision de la communication politique. Séguéla s’attribue lui aussi la paternité du slogan « La force tranquille ». Il y a là une petite ambiguïté qui sans doute ne sera pas levée.

23 Le président de la république est le chef des armées, donc le supérieur ultime des Gendarmes

24 Mitterrand, une vie, p. 765

25 Depuis 1981, à peine quelques mois après sa première élection.

26 Il subsiste un petit mystère à propos de cet « environnement » dont il est question ici. Malgré la proximité de Mitterand avec les terroirs et la nature, il n’a jamais été un « environnementaliste » en politique. Pourquoi ?

27 Allocution de François Mitterrand, Président de la République, à la mairie de Florac (Lozère), lundi 24 juin 1985. Disponible sur http://discours.vie-publique.fr/notices/857009200.html

3 thoughts on “Mitterrand et les Cévennes

  1. Marc
    Bravo pour cette histoire trés interessante ..je vais te relater une anecdote racontée par Mme Ponge proprietaire de l auberge des Vanels ..

    un jours dans son restaurant se trouvait Mitterand et ppar hazard aussi les enfants de Rocard qu il ne connaissait pas .en effet la première èpouse de ROCARD s appelait Genevieve Poujol de la famille immensément connue originaire de Vebron et Mme PONGE racontait de façon savoureuse comme elle les avaient présentés . il me semble que c était la période ou il commençait a y avoir des tensions entre ces deux personnages

  2. Merci de ce texte magnifique et respectueux à la fois des Cévenols et de l’ancien président. François Mitterrand avait le génie de trouver des lieux magiques. Il me tarde d’aller explorer ce chemin et de mettre mes pas dans ses randonnées.

  3. Félicitations pour ce récit passionnant et fort bien documenté, sans parler d’une rédaction impeccable. Je découvre ainsi cette histoire cévenole, après avoir vu hier sur France 5 une superbe documentaire dans la case du siècle :
    François Mitterrand & Anne Pingeot – Fragments d’une passion amoureuse
    Pas spécialement fan du personnage, j’ai vraiment apprécié ce documentaire que je vous recommande, cependant je ne crois pas qu’il y soit fait allusion aux cévennes…
    Bonne continuation!

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