Grotte des fées de Bassurels
A son extrémité sud, la can de l’Hospitalet se termine de manière
abrupte au dessus de la vallée Borgne. Une longue falaise domine la
commune de Bassurels et le hameau de Cripsoules, face aux premières
pentes de l’Aigoual. C’est un site magnifique, dominant et venté, plein
de beauté et de force, qui porte le nom de Puech Vendut. Quelque part au pied de cette falaise, cachée par les buis foisonnants, se cache la baume des fées, ou grotte des fées. D’un point de vue spéléologique, c’est une cavité d’intérêt relativement
modeste. Un premier porche, accessible par deux ouvertures, forme un
volume confortable, assez spacieux pour accueillir 6 ou 7 personnes
assises ou debout. Une galerie part du fond du porche vers le nord,
perpendiculairement à la falaise. Après un court virage, la galerie
aboutit dans une petite salle assez haute de plafond (une dizaine
de mètres). On peut y voir quelques concrétions, sous forme de
draperies, ce sont les seules. De cet endroit partent deux étroites galeries : l’une vers le haut,
l’autre vers le bas. Les deux « queutent » rapidement. Celle du haut
laisse entrevoir, après quelques mètres d’étroiture, un élargissement
qui pourrait être à nouveau praticable. Des traces de forage permettent
de comprendre que des spéléos ont entrepris d’élargir le passage à
l’explosif avant d’abandonner le projet. La galerie du bas descend
d’environ 2 mètres, sur 7 à 8 mètres de long, et queute sur une
étroiture. Elle est remplie de cailloux de quelques centimètres de
diamètre dont l’homogénéïté fait penser à un apport artificiel… Voilà
pour la description physique des lieux. Guère de quoi occuper un
spéléologue plus d’un quart d’heure. Mais la grotte mérite l’intérêt pour d’autres raisons. Elle a été
officiellement signalée pour la première fois en 1933 par le spéléologue
Robert de Joly, mais elle a toujours été connue et fréquentée par
les habitants des environs. C’est dans les années 50 que quelques
enfants des alentours, venus y abriter leurs après-midi de jeux,
trouvent par hasard des ossements qui dépassent ici et là. Ils ramènent
leurs trouvailles, qui sont comme souvent dans la région attribuées à
des camisards. Deux jeunes garçons curieux de la région entendent parler
de la chose. Ils fouillent l’entrée de la grotte, et en extraient
d’autres ossements dont deux crânes féminins (est-ce de cette découverte
que date la dénomination de « fées » donnée à la grotte ?), ainsi que
quelques silex parmi lesquels une belle pointe de flèche, et des vases
en terre grossière. Ils portent l’ensemble de leur découverte à la
société des amis des sciences de Nîmes. Les ossements, examinés par le
docteur Ely, d’Avignon, ont révélé un sujet dolichocéphale d’entre 20 et
30 ans, et un sujet très brachycéphale âgé de 20 ans. L’ensemble est
daté sans ambiguïté de l’âge du fer ou un peu avant. La grotte des fées
est donc une grotte dite « sépulcrale » (c’est à dire ayant servi de
sépulture) d’origine proto ou préhistorique. Sachant qu’à quelques
centaines de mètres au sud-est se trouve le cap barré
du Causset, site d’habitat datant également de l’âge du fer,
l’hypothèse arrive naturellement : Enterrait-on ici les morts de là-bas ? Trouver la baume des fées sans indications est difficile. J’ai moi-même
eu besoin de plusieurs tentatives pour y parvenir, à une époque où, il
est vrai, les buis en cachaient encore totalement l’entrée. Il serait
donc inconvenant que vous-même la trouviez trop facilement, aussi ne
vous en donnerais-je pas les coordonnées précises. Je préfère vous
proposer un jeu de piste. Voici la règle : rejoignez le point côté 1050
du Puech Vendut (ouvrez votre carte IGN). Repérez, au fond de la vallée,
le magnifique « Chateau du Poujol » sur son promontoire. Puis commencez
à marcher vers l’est en suivant le rebord du plateau. Après quelques
dizaines de mètres, la modification de perspective va amener un
épaulement de schiste devant le château. Lorsque la moitié inférieure
droite du bâtiment aura disparu, arrêtez-vous. Vous êtes à l’entrée du
sentier (peu marqué) qui descend à la grotte. Un Cairn marque d’ailleurs
son emplacement. Il vous faut maintenant descendre d’une trentaine de mètres de dénivelé,
tout droit dans la pente. A deux reprises vous devrez mettre les mains
car la pente est parfois raide t traverse de petites barres rocheuses.
Cherchez sur la gauche. Deux petites précisions pour terminer. Tout d’abord, la grotte des
fées accueille des chauves-souris. Il faut absolument éviter d’y aller
en hiver et au début du printemps… N’oubliez pas non plus que vous êtes
sur les terres des agriculteurs de l’exploitation des Crottes. Respect
et discrétion sont de rigueur.
A noter, à proximité immédiate de la grotte des fées, la présence
d’une autre grotte présentant le même genre de topographie. Elle était
fermée par un petit éboulement de terrain, je l’ai découverte en 2006.
C’est la grotte des sorcières.
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